FREE PARTY – Free Global Positioning System (Article paru dans la Plume des Insoumis)

Depuis quelques années, la mode est au partage de coordonnées GPS dans l’objectif de simplifier la localisation d’une teuf. Pratique courante entre participant·es, mais aussi parfois à l’initiative de sound systems. En acceptant le passage du mouvement free party à sa version 2.0, il est tout de même bon de rappeler en quoi cette pratique est à déconseiller, voire à proscrire. État des lieux.
Article paru dans le fanzine La Plume des Insoumis Hors-série n°1 (avril 2020)
Loin est le temps des infolines, accroché·e au combiné de son fixe ou de la cabine téléphonique la plus proche, décryptant l’itinéraire enregistré au préalable sur la boîte vocale par le sound system. Dégainant sa plus belle carte routière Michelin, l’heure de décoller vers le lieu de la fête avait sonné, s’enfonçant dans la nuit noire. Des convois de voitures et de camions se formaient souvent aux abords du site, à la recherche de l’accès promis. Attention aux mauvais choix de directions, engendrant de longs demi-tours. Avec l’arrivée des téléphones portables et des SMS, ce principe au fameux code à six chiffres a réussi à subsister, par souci de diffusion de l’information en interne à la communauté free party. L’infoline a ainsi évolué se targuant dorénavant du (très pratique) “texto écrit”, transcription de l’itinéraire dicté à l’oral. Une avancée certaine, évitant bon nombre d’erreurs cruciales dans la quête du Graal, notamment concernant le nom des villages et divers hameaux à traverser.
Smartphone, localisation et coordonnées GPS
Aujourd’hui, s’en est finit des Nokia et autres Motorola : place au règne du smartphone. Une nouvelle ère technologique impactant grandement le quotidien de chacun·e, ne laissant pas la free party en reste. Si l’on peut se féliciter de l’accès à certains réseaux de messageries cryptées et sécurisées, l’arrivée du GPS (Global Positioning System) et ses coordonnées précises est quant à elle une tout autre histoire. Bien que pratiques – notamment avec Waze pour les contrôles de police –, voici un petit récapitulatif des raisons pour lesquelles les tant convoités points n’ont d’autres intérêts que de mettre à mal la bonne gestion d’une teuf.
Tout d’abord, l’utilisation de ces coordonnées amplifie grandement les risques et les retombées d’une fuite par rapport à la localisation exacte du site. Combien même si l’info circule contre le gré des organisateurs, un SMS écrit reste relativement flou et ne pointe pas au degré près le terrain visé. Et ce, sans parler du partage de géolocalisation une fois arrivé sur place. Deuxièmement, si au travers de l’infoline les organisateurs stipulent de passer par une route précise et non par une autre, ce n’est sûrement pas pour rien. En effet, très souvent plusieurs chemins permettent d’accéder au site, mais ce n’est pas une raison pour n’en faire qu’à sa tête, ou plutôt de suivre bêtement le GPS. En voici plusieurs facteurs :
- L’itinéraire est choisi judicieusement, afin de notamment ne pas passer devant des zones sensibles et être le plus discret possible (centre-village, habitations et fermes isolées), mais aussi pour éviter de se retrouver bloqué dans un chemin impraticable (ornières, arbre en travers du chemin, pas accessible pour tous les véhicules, etc.) ;
- Emprunter le chemin prescrit dans l’infoline permet de transiter par la donation et ainsi soutenir le sound system œuvrant pour cette soirée, mais aussi se faire diriger vers le parking par l’équipe en charge de cette mission. Un passage clé où sont également transmises des informations précieuses sur le site en question (champs de culture à éviter, falaise, cours d’eau, zone marécageuse, etc.) ;
- De ces précautions, découle alors le fait de préserver l’accès secours, celui-ci est primordial dans la gestion d’une free party en cas de pépins de santé majeurs. Il est donc important de ne surtout pas y circuler ou s’y garer, afin de le laisser constamment libre, et comme son nom l’indique, accessible aux secours.
Faire des choix stratégiques pour lutter contre la répression
De plus, certains sound systems mettent en place des tactiques permettant de switcher de département au dernier moment sur l’itinéraire, laissant ainsi sur le carreau les forces de l’ordre souhaitant intervenir. Même si aujourd’hui gendarmerie et autres polices peuvent dépasser ponctuellement les frontières de leur secteur, cela chamboule un tant soit peu leur manière d’appréhender la zone d’impact de l’événement. Cependant, et afin de nuancer (car il est toujours important de nuancer), en cas d’extrême urgence face à une répression policière (changement de site, manque de public, etc.), les coordonnées GPS peuvent parfois s’avérer bénéfiques pour sauver la mise, en dernier recours. C’est donc un outil de communication à utiliser à bon escient, uniquement si les organisateurs le décident, et non par praticité ou facilité pour transmettre l’infoline à son prochain.
Dans l’optique où le trajet devient une galère et un périple sans nom, il faut tout de même s’avouer que la recherche d’une teuf, l’oreille affûtée au son des basses lointaines, possède son charme et procure une des plus grandes satisfactions à l’arrivée. Un peu comme une chasse au trésor grandeur nature. Si ce n’est pour partir à l’aventure le temps d’une soirée ou d’un long week-end, autant sortir son smartphone et taper l’adresse de la boîte de nuit la plus proche sur Google Maps. Concernant la musique, c’est une autre histoire…
Article : FREE PARTY – Free Global Positioning System
Réalisation : Erwan
Visuel : Erwan
Photos : Erwan
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